Adoptée discrètement mais aux effets importants, la réforme du Code de la route italien interdit, dès 2025, aux conducteurs de plus de 68 ans de prendre le volant de poids lourds ou de semi-remorques. Concrètement, cela concerne les détenteurs des permis C et CE, utilisés par les chauffeurs routiers et professionnels du transport.
En revanche, les titulaires des permis A et B, qui permettent de conduire voitures particulières, scooters et motos légères, ne sont pas touchés. Ils devront seulement remplir certaines conditions médicales et administratives.
La loi introduit aussi des sanctions sévères : une amende pouvant atteindre 1 200 euros et jusqu’à huit mois de suspension de permis en cas de non-respect. Ces nouvelles règles s’ajoutent à un cadre déjà exigeant. En Italie, les conducteurs professionnels sont soumis à des visites médicales obligatoires dès 50 ans, contre 60 ans pour les automobilistes classiques.
Pour beaucoup de seniors, la mesure est vécue comme une perte brutale de liberté, voire une menace pour leur emploi. Les défenseurs de la réforme mettent en avant la sécurité collective : avec l’âge, la vue, les réflexes et la résistance à la fatigue diminuent, ce qui augmente les risques lorsqu’on conduit des véhicules lourds.
Sécurité routière et vieillissement : pourquoi l’Italie agit
Le gouvernement italien justifie sa décision par une tendance inquiétante : la hausse des accidents impliquant des conducteurs âgés de poids lourds. L’objectif affiché est de prévenir ces drames en anticipant la baisse progressive des capacités physiques et sensorielles.
Cette réflexion dépasse les frontières italiennes. En France, le débat autour d’un « permis senior » ou d’examens médicaux obligatoires à partir de 70 ans revient régulièrement, sans qu’aucune loi n’ait encore été adoptée. D’autres pays européens réfléchissent eux aussi à adapter leur législation au vieillissement de la population.
Avec un tiers de la population âgé de plus de 60 ans d’ici 2035, l’Italie prend une longueur d’avance. Restreindre l’accès aux véhicules lourds pour les plus de 68 ans est présenté comme une mesure de précaution face à cette transition démographique.
Une réforme qui divise : entre liberté et précaution
Cette décision crée un vif débat. D’un côté, les partisans estiment que c’est une mesure de bon sens, qui protège aussi bien les seniors que les autres usagers de la route. De l’autre, les opposants dénoncent une discrimination fondée uniquement sur l’âge, sans prendre en compte l’état de santé réel de chaque conducteur.
Beaucoup de chauffeurs expérimentés de plus de 68 ans conservent de bonnes capacités physiques et se sentent capables de continuer à exercer. Pour eux, cette loi met fin brutalement à leur carrière. Les syndicats demandent donc des alternatives, comme l’adaptation des véhicules : sièges ergonomiques, aides technologiques ou systèmes d’assistance renforcés.
Au-delà de l’Italie, la question pourrait rapidement devenir européenne. La France, l’Espagne ou l’Allemagne suivent de près l’évolution de cette réforme, qui pourrait inspirer de futures législations.
Dans plusieurs pays européens, l’âge et la conduite sont déjà encadrés par des règles spécifiques. La Belgique, les Pays-Bas ou l’Allemagne imposent des examens médicaux réguliers aux conducteurs âgés, afin de vérifier leur vision, leurs réflexes et leurs aptitudes motrices.
La France n’a pas fixé de limite d’âge stricte mais réfléchit à l’instauration d’un permis renouvelable dès 70 ans. Quant à l’Union européenne, elle envisage une harmonisation des règles pour éviter les disparités entre États membres.
L’Italie, avec sa nouvelle loi, va plus loin en posant une interdiction claire pour certaines catégories de véhicules. Cette décision marque une étape majeure dans la réflexion européenne sur la sécurité routière face au vieillissement de la population.